Le jeu du miroir

 

Le miroir au début c’est un jeu. On découvre son reflet et l’on rigole avec cet autre nous. On découvre notre visage, notre corps. Avez-vous déjà observé un tout petit enfant devant un miroir? Avez-vous déjà vu comme il s’aime et comme il s’amuse de ce reflet?

Quand ai-je cessé de regarder mon reflet en jouant? Je n’arrive pas à m’en souvenir. Au jeu du miroir, je suis devenue très bonne, je sais me contorsionner pour observer les moindres recoins de mon corps.

Et puis peut-être que ça a été le temps qui a fait son œuvre. Ou peut-être une vague de bienveillance. Ou alors tout simplement un début d’acceptation. Je ne suis pas parfaite. Je suis jolie. Plutôt normale. Avec des défauts. Un nez avec une bosse et un menton qui remonte un peu. Je trouve que mon profil ressemble à celui des sorcières de mon enfance.

Mes genoux un peu gros, et des cuisses toujours plus larges que ce que je voudrais et forcément elles étaient « mieux avant », même si avant je les détestais tout autant. Et plus récemment un bidon. Je connais leurs histoires, nos chagrins à tous cohabiter avec mes envies et mes idées. Souvent je les ai vexés, en les appelant défauts.

Alors un jour, quand le chéri m’a dit que ce n’était pas des défauts mais des parts de moi à aimer, à dorloter, comme une enfant chagrinée. Mon corps comme une enfant. Une enfant meurtrie et ballottée par mes envies et celles de la société.

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Ah la société, on la blâme beaucoup ces dernières années. Et moi je m’en veux beaucoup de m’être laissé influencer, de n’avoir pas su me protéger.

Après mon adolescence fine et musclée, mon corps de jeune femme, élancé et équilibré, lorsque ma pillule n’a plus convenue, lorsque cela a pris 3 ans à comprendre où était l’intrus, j’ai blâmé mon corps pour le superflu.

Sur les 18 kilos accumulés, 8 sont déjà partis. Avec mon corps on les a regardé s’envoler en 2 mois. Et ensuite ce fut moi, l’enfant. Naïvement j’ai attendu. Attendu que les 10 autres fassent de même. J’attendrais peut-être encore si une amie ayant vécu sensiblement la même chose ne m’avait pas ris au visage.

« Mais enfin ! C’est fini tes 13 ans et le corps svelte sans efforts. Il va falloir faire du sport ! » Moi. Du sport. Ma peur des ballons, ma honte de ma gaucherie devant les autres. Mon appréhension de la course et de l’odeur de la salle de gym. Et puis l’illumination. Une vision de l’avant. Collants et chaussons noirs. Miroirs et barres au mur. Mon corps et mon reflet en harmonie. Aucun soucis.

Aujourd’hui à nouveau je me contorsionne devant le miroir. Je regarde mes hanches, mes genoux, mes cuisses. j’apprivoise cette silhouette petit à petit. Parfois je capte mon profil. Et je souris à mon menton qui remonte vers la bosse de mon nez. J’étire mes jambes, une en avant, une en arrière, et je laisse peser mon bassin vers le sol.
Bientôt, à nouveau, ce sera le grand écart. Un grand écart entre la femme et l’enfant, mais finalement, ne sont-elles pas toutes les deux reliées par leur envie de s’aimer ?

Lectures apaisantes pour les corps en mouvements:
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Un livre qui se dévore. Je le conseille aussi bien à ceux qui comme moi aiment la littérature jeunesse, qu’à ceux qui cherchent un roman agréable et facile à lire (idéal pour digérer la bûche sans culpabiliser). J’ai prêté mon exemplaire à plusieurs amis, et tous ont été ravis de cette découverte.
La plume de Clémentine Beauvais est hors pairs, elle emmène tout le monde dans cette histoire drôle, terriblement humaine de Mireille , Astrid et Hakima qui sont nommées « Boudins » de leur collège de Bourg-en-Bresse. Je ne vous raconte pas comment cela arrive, mais elles décident de partir crasher la garden party de l’Elysée le 14 juillet, à vélo!

Clementine Beauvais-Les petites reines

 


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C’est un des plus beaux projets photos que j’ai vu ces dernières années. J’aime beaucoup regarder des photos, pour le plaisir de me raconter une histoire avec une image. Le projet de Mihaela Noroc est merveilleux de simplicité: parcourir le monde et photographier la diversité de la beauté à travers le monde. Dans cet ouvrage c’est 50 pays qui sont immortalisés à travers leurs femmes. La beauté est omniprésente et capturée indépendamment de la condition sociale et financière, de l’ethnie, de la couleur de peau, de la taille. Et ce que j’aime par dessus tout, c’est que chacun de ces portraits est capturé dans l’environnement naturelle de chaque femme, rien n’est modifié pour enjoliver. C’est de la beauté pure.

The Atlas of beauty – Mihaela Noroc

 

 

2 commentaires

  1. c’est tellement compliqué, ce rapport que l’on a au corps, notre génération. On est énervées, frustrées que les medias nous aient bercé d’images de jeunes femmes maigres, trop maigres, maladives, que l’on adorait, que l’on souhaitais être. On veut se battre, on veut dire qu’on s’en fiche, et que mince, on est bien comme on est ! sauf que, tout comme les hommes ne font pas exprès d’attendre qu’on fasse la cuisine, c’est ancré en nous. Avec l’age on se détache un peu plus même si on le vit toujours pas super bien, ce micro bourrelet, cette petite vergeture … ce genre de choses. On passe une vie entière à apprendre à s’aimer

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    1. C’est exactement ça! Mais je trouve ça merveilleux et un peu excitant finalement. Lorsque l’on commence cette démarche, comme toute démarche d’amour, elle ne s’arrête jamais. Chaque avancée à ses épreuves. On ne recule pas, on s’apprivoise un instant pour mieux s’aimer, sur la durée ❤

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