Après avoir obtenu mon diplôme et mon concours, voici que je suis devenue enseignante titulaire à la rentrée. Et parce que je vous sais plusieurs à passer le concours et à me lire, j’ai eu envie de vous faire un petit retour sur ces derniers mois. Les premiers dans ce nouveau métier.
Bien sûr j’avais déjà enseigné. Mais toujours avec un tutorat ou bien un binôme que je savais non loin, en cas de doutes ou de problématiques importantes. Si certains camarades de promo se sont sentis étouffés par ce cadrage, je l’ai pris et le prends toujours avec sérénité. C’est à mon sens un moyen de gagner en autonomie tout en ayant quelqu’un de plus expérimenté auprès de qui s’informer. Cependant, ce n’est pas toujours évident. Nombre de mes collègues de Master ont eu des binômes qui ne souhaitaient pas partager un poste avec un enseignant stagiaire, et donc les abandonnaient complètement, coupant la communication entre eux. C’est assez dangereux, puisque cela peut nuire aux élèves plus qu’aux enseignants, et que dans le même temps, un enseignant stagiaire anxieux devra développer de nombreuses stratégies et déployer beaucoup d’énergie pour se maintenir à flot lors de cette année chargée en travail et en émotions.
Mais pour ma part, j’ai eu de la chance. Mon année d’alternance en M1 m’a permis d’aborder sereinement celle de stagiaire en M2. Et cette année de stage, bien qu’épuisante à beaucoup de niveaux, m’a permis d’aborder encore plus sereinement la suite.
T1 et TRS
Dans mon secteur, la plupart des T1, les Titulaires 1ère année (soit l’année qui suit l’obtention de votre diplôme et validation de stage, nécessaire à l’exercice des fonctions) sont pour la plupart remplaçants, des TRS. Certains pourront avois leur classe mais ce n’est pas la majorité.
Le risque étant que lors du 1er tour du mouvement d’affectation des postes, vous demandiez des postes que vous ne pourrez pas avoir (pas assez de points, pas prioritaire, etc) beaucoup de T1 se retrouvent au second tour, avec des ¼ temps. Certains se retrouvent donc avec 4 classes différentes, 1 jour par semaine, un rythme plutôt fatiguant pour moi.
L’autre possibilité, elle aussi majeure, est d’être affecté comme remplaçant, sur des remplacements longs ou courts.
Mon choix pour cette année
Après avoir discuté avec les remplaçants que je rencontrais l’an dernier, j’ai eu envie d’expérimenter ce qu’ils me décrivaient comme un poste agréable, enrichissant et moins stressant qu’un titulaire de classe.
Oui. Ca me parlait. Après une année à m’épuiser entre l’université et la classe, à ne pas pouvoir prendre autant soin de mes élèves que je l’aurais voulu, l’idée de circuler de classes en classes me plaisait.
J’avais envie de découvrir ce que mes collègues mettaient en place. Pas seulement d’observer et d’en discuter avec eux, mais de le vivre, de l’expérimenter.
J’avais envie de me nourrir sur le plan didactique, la construction des cours, tout en me laissant plus de temps pour travailler ma gestion de classe.
Alors, j’ai demandé dès le premier tour à être remplaçante. Pour être honnête, je n’ai pas demandé que ça. J’ai aussi demandé à prendre une classe en ULIS. Je voulais faire quelque chose de différent.
Fin juin, j’ai donc appris que je serais remplaçante dans la ville où je vis, un gros avantage car cela me permet de me déplacer à vélo voir à pied certains jours ! Un luxe que j’affectionne. Le vendredi soir précédent la rentrée, on me donnait une affectation pour les premiers jours.
Depuis, j’ai été un peu dans tous les niveaux, dans différentes écoles. J’ai côtoyé différents publics, répondu à différentes problématiques, et surtout, surtout, j’ai observé.
Au quotidien ça donne quoi ?
En réalité c’est assez simple, et c’est un rythme que je trouve plaisant. Est-ce que c’est les remplacements ou bien l’absence d’université, toujours est-il que cette année j’ai du temps pour moi. Tricoter, bricoler, coudre, lire… Lire. Cela semble peu mais c’est tant pour moi.
L’an passé j’ai vraiment été malheureuse de ne jamais pouvoir me ressourcer.
Aujourd’hui, j’attends le coup de fil du matin, vers 8h20, qui me dira vers quelle école je dois guider mon vélo. Parfois pour la journée, parfois pour une semaine ou plus. Le changement de statut des remplaçants fait que nous pouvons aussi bien remplacer à la journée que sur plusieurs mois. Dans ma circonscription on nous demande nos préférences. En période 1, j’ai fait des remplacements courts, mon premier choix. Au total 10 classe en 7 semaines. Jusqu’au solstice, je serai sur un remplacement long, en Ce2 un niveau que je connais bien puisque c’était celui que j’avais l’an dernier.
Dans les deux cas, je n’ai pas eu beaucoup de préparation. Les enseignants en poste préparent leurs cours, et en général, je continue ce qu’ils mettent en place. C’est un choix de ma part, je pourrais aussi arriver avec mes cours et ma préparation. Mais dans ma démarche cette année je veux découvrir la manière de faire d’autres que moi. Simplement parce que j’ai peu d’expériences, donc me limiter à ma manière de faire, si tôt, sans rien remettre en question reviendrai à manger le même plat tous les jours. Un peu fade et triste.
Cependant, pour les 7 semaines à venir, je pourrais apporter des projets, ma petite touche sur certaines matières. En arts par exemple, j’espère pouvoir faire travailler sur la sculpture à travers la préhistoire, une séquence que j’avais créé pour mes élèves l’an dernier et qu’ils avaient adoré. J’avais envie de revenir dessus, de l’améliorer, ce sera ici l’occasion.
Bilan de deux mois
Je découvre beaucoup, j’apprends toujours, et j’ai le temps de m’occuper des élèves sans stress. Pour vous donner un indicateur, l’an dernier il m’arrivait de ne pas avoir le temps d’aller aux toilettes. Cela arrivait même très souvent. Depuis le début de l’année, ça ne m’est arrivé qu’une fois, sur un poste assez chronophage.
D’ici à la fin de l’année j’aurais considérablement augmenté mon bagage, plus qu’en 2 ans d’université. Mieux encore, j’aurais pu expérimenter ce bagage. Quels niveaux j’affectionne particulièrement ? Dans quelles matières dois-je mettre l’accent pour me perfectionner, et comment? Quelles méthodes découvertes cette année me font envie pour le jour où j’aurai envie d’avoir ma classe. Pour être honnête il est encore tôt pour dire si je demanderai ma classe l’an prochain. Pour le moment, je suis si bien dans les remplacements que je m’y vois encore quelques années. Mais tout peut changer, on ne sait jamais de quoi demain est fait.
Futur enseignants
A ceux qui se demande si le remplacement est fait pour eux, je dirai ceci : Si vous aimez expérimenter, si vous avez envie de voir d’autres choses et de vous laisser le temps de choisir les méthodes qui vous conviennent le mieux, oui.
Le remplacement est en ce sens idéal qu’il permet de voir beaucoup en préparant peu. Ainsi tester quelque chose de nouveau est moins effrayant puisqu’il ne demande pas de se plonger sur le comment de la mise en place.
Autre gros avantage, les remplaçants sont denrée rare. Vous aurez donc toutes vos chances d’avoir un poste à côté de chez vous, ce qui en terme de temps de transport est non négligeable. Combien de T1 ai-je vu demander leur classe et finalement se retrouver avec des temps partiels à parfois 1h30 de transport ? Merci mais très peu pour moi. S’il faut choisir entre deux incertitudes, je préfère encore être près de chez moi et ne pas savoir où je serai demain. Puisque quoiqu’il arrive, demain, je serai dans une classe qui est en place.